Au Japon, l’accouchement sous secret n’est pas inscrit dans les mœurs. Cette année, un hôpital a reçu des femmes qui souhaitent accoucher sous secret, ce qui a conduit le Ministère de la santé et le Ministère de la justice à publier un premier document relatif à cette question, “Protocole en cas d’accouchement si la mère ne choisit de ne pas communiquer son nom à l’ensemble des services” le 30 septembre 2022.
Voici quelques commentaires :
- Point positif 1° : L’État ne recommande pas l’accouchement sous secret. Cependant, il a permis la rédaction des dossiers avec un pseudonyme, ainsi que la possibilité de rédiger un acte de naissance de ces enfants sans parents.
- Point positif 2° : Ces enfants seront orientés vers un processus d’adoption, et il y a une liste de 23 institutions privées qui encadrent ces adoptions. Donc l’enfant ne sera pas pris en charge par l’ASE (Aide Sociale à l’Enfance), ne va pas y rester pour une durée trop longue et il n’y aura pas de recherches réalisées pour connaître les grand-parents du bébé.
- Manque 1° : Il n’y a pas de mention sur le besoin d’aide de ces femmes, ni aucune indication pour les renseigner sur les aides existantes. À aucun endroit, le soutien psychologique ou social de la femme n’est évoqué.
- Manque 2° : Qui prendra en charge les frais hospitaliers et de l’accouchement (environ 4000€) ? Qu’est-ce que les hôpitaux doivent garder en tant qu’informations nécessaires sur les parents ? Il devrait avoir une règlementation sur la gestion de ces données. Qui va faire le suivi de ces enfants accueillis chez la famille adoptive ?
- Risque : En 10 pages, le mot “persuader” revient à 15 reprises : le personnel de l’hôpital doit persuader les femmes de donner leur identité. Les hôpitaux peuvent comprendre que l’accouchement sous secret est une pratique déconseillée par l’Etat, et donc être incités à persuader les femmes de donner leur identité. Cela peut provoquer une situation difficile pour les femmes. Il est écrit que dans une optique de laisser la possibilité à l’enfant de connaître ses origines, et pour aider la femme et l’enfant, il faut tenter de persuader les femmes de donner leur identité. Pour obtenir l’information de l’identité de la mère, plusieurs personnes peuvent faire pression : non seulement le personnel hospitalier, mais aussi le personnel du département, par exemple.
- Cette année, un cas s’est présenté d’une femme qui a souhaité garder le secret lié à la maltraitance subi par ses parents, contrairement à l’hôpital qui a expliqué à la femme que ses informations identitaires seront réservées exclusivement à son enfant et en cas de demande, l’ASE a mené des enquêtes pour retrouver les grand-parents de ce bébé, niant le souhait de la femme. Les données censées être confidentielles ne le sont en fait pas, la problématique du traitement de données de manière confidentielle n’étant pas du tout réglementée.
Le nouveau guide est publié avec un intérêt de contrôle pour que cette pratique reste minoritaire : cela fait peser l’opération sur l’hôpital et ne constitue pas une proposition ouverte, neutre, à l’attention des femmes. L’hôpital doit en effet prendre en charge toute la procédure, y compris la tenue des dossiers des femmes et faire la liaison entre les femmes et l’enfant pour une longue durée.
Cette actualité illustre le manque de soutien avant l’accouchement au Japon.
- Contraception : Les recherches montrent que c’est le préservatif qui est utilisé dans 82% des cas, contre 4,2% pour la pilule. L’accès à cette dernière n’est pas simple : la consultation chez le gynécologue revient à 50€ en moyenne, il faut pouvoir faire valoir d’un justificatif de la sécurité sociale, la pilule revient à environ 24€ par mois…etc. La pilule de lendemain est encore plus difficile d’accès.
- Avortement : il faut la signature du père du bébé et pour les mineurs celles des parents, et l’opération coûte environ 1200-2000€. Seul l’avortement chirugical est possible. C’est pourtant un cas fréquent que le père disparaîsse après la nouvelle de la grosse, et que la femme se retrouve seule sans les ressources suffisantes pour régler cette somme.
- Protection de l’enfance : en France, 1% des enfants vivent séparés de leur famille dans le cadre de la protection de l’enfance. Au Japon, c’est seulement 0,2%. Comme la loi dit que la protection est applicable seulement dans le cas de maltraitance grave, il faut que ça soit prouvé et comme il n’y a pas de Juge des enfants, cela implique une négociation avec les parents. En réalité, cela conduit à une situation où un certain nombre d’enfants sont maltraités sans pouvoir être protégés. Beaucoup d’entre eux se refugient dans l’industrie du sexe et deviennent l’objet de pratiques risquées. Pour les majeures aussi, comme il est difficile de bénéficier du service social, elles peuvent être dirigées vers l’industrie du sexe. Le métier le plus “choisi” des sortants de l’ASE est aussi ce secteur.
- Consultation pendant la grossesse : elle coûte environ 100€ chaque mois, et si on ne consulte pas de manière régulière, les hôpitaux refusent d’accueillir la future mère. L’accouchement coût environ 4000€.
Conclusion :
- Si la femme a le sentiment d’être respectée dans ses décisions, elle pourra retourner demander de l’aide, mais si le message qu’on lui transmet est qu’on ne respecte pas son souhait, la perspective d’accès aux aides sera nulle.
- Même si les femmes refusent de donner leur identité, elle devraient être éligibles à toutes les aides.
- L’information que l’enfant souhaite dans le futur n’est pas juste les informations identitaires : en France, tout un corpus d’informations sont collectées et mises sous scellées, à la disposition de l’enfant seul et sur sa demande uniquement. Au Japon, seule l’identitée concentre l’attention, et même cette unique information n’est pas protégée.
- Cette problématique doit être traitée en plusieurs étapes qui précédent l’accouchement.
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